L’Autriche va fermer sept mosquées et expulser jusqu’à 60 imams
Le gouvernement conservateur autrichien a lancé vendredi une spectaculaire offensive contre «l’islam politique» qui devrait conduire à l’expulsion de dizaines d’imams et la fermeture de sept mosquées financées par la Turquie
Le chancelier conservateur autrichien Sebastian Kurz a annoncé vendredi que son pays fermerait sept mosquées, dans la foulée d’un scandale suscité par la reconstitution, dans une des principales mosquées de Vienne affiliée à la communauté turque, d’une bataille emblématique de l’histoire ottomane jouée par des enfants habillés en soldats.
«Des sociétés parallèles, l’islam politique et la radicalisation n’ont pas leur place dans notre pays», a assuré le chef du gouvernement autrichien lors d’une conférence de presse.
«Le cercle de personnes qui pourraient être affectées par ces mesures comprend environ 60 imams», a précisé le ministre de l’Intérieur Herbert Kickl. Leurs familles sont également concernées et 150 personnes au total pourraient perdre leur droit de résidence en Autriche, a-t-il indiqué.
Dans certains cas, le processus d’expulsion d’imams liés à l’Atib a d’ores et déjà commencé, a déclaré Herbert Kickl, membre du parti d’extrême droite FPÖ qui fait partie de la coalition formée en décembre avec les conservateurs.
Mise en scène «hautement regrettable»
Les photos de la reconstitution de la bataille de Gallipoli, jouée par des enfants dans les locaux de la mosquée, ont été publiées par l’hebdomadaire de centre gauche Falter et ont largement ému la classe politique autrichienne, toutes tendances confondues.
Les clichés montraient les jeunes garçons en tenue de camouflage alignés en rang, faisant le salut militaire, et agitant des drapeaux turcs, devant un public d’enfants. Sur une autre photo, certains sont allongés pour figurer les victimes de la bataille, leur corps enroulé dans un drapeau turc.
La mosquée incriminée est gérée par l’Union islamique turque d’Autriche (Atib), directement liée à la Direction turque des affaires religieuses (Diyanet). «Ce qui s’est passé à cet endroit […] n’a pas sa place en Autriche. Le gouvernement fera preuve d’une tolérance zéro», avait alors déclaré Sebastian Kurz, promettant une réaction «forte».
L’Atib a qualifié la mise en scène de «hautement regrettable» indiquant dans un communiqué être intervenu auprès de la mosquée avant que la controverse n’éclate dans les médias et avoir demandé la démission du responsable.
Gallipoli, symbole de la résistance turque
La bataille des Dardanelles a commencé en février 1915 par la tentative d’une flottille franco-britannique de forcer le détroit pour s’emparer d’Istanbul, capitale de l’Empire ottoman. Repoussés, les Alliés ont débarqué le 25 avril à Gallipoli mais ont été défaits après de longs mois d’offensive.
L’Empire ottoman a fini la Première Guerre mondiale dans le camp des perdants et a été démantelé. Mais la bataille de Gallipoli est devenue un symbole de la résistance qui a abouti à l’avènement de la République turque moderne en 1923.
En réaction aux fermetures annoncées, la Turquie a dénoncé vendredi une mesure «islamophobe» et «raciste».
«La fermeture par l’Autriche de sept mosquées et l’expulsion d’imams est le résultat de la vague populiste, islamophobe, raciste et discriminatoire dans ce pays», a réagi sur Twitter Ibrahim Kalin, porte-parole du président Recep Tayyip Erdogan.
«La position idéologique du gouvernement autrichien va à l’encontre des principes du droit universel, des politiques de cohésion sociale, du droit des minorités et de l’éthique de coexistence», a-t-il ajouté.
Environ 360 000 personnes d’origine turque vivent en Autriche, dont 117 000 de nationalité turque. Les relations entre Ankara et Vienne sont particulièrement tendues depuis la répression qui a suivi la tentative de putsch contre Recep Tayyip Erdogan en juillet 2017.
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